Résumé
Voici plus d'un siècle que l'industrie artisanale de la tannerie, si répandue jadis en Ardenne, est entrée dans son déclin et près de cinquante années qu'Houffalize la dernière ferma ses portes. Ici comme ailleurs en Luxembourg, à La Roche, Saint-Hubert, Bastogne, Neufchâteau, Bouillon, qui furent des centres importants, les traces matérielles et le souvenir même de cette ancienne activité ont presque complètement disparu, dont quelques anciens cependant se souviennent.
La nécessité était devenue urgente de recueillir les derniers témoignages vivants et le moment opportun de rassembler, pour les y confronter, les documents d'archives écrites. C'est ce qu'a fait depuis une vingtaine d'années déjà M. Dubru qui, depuis bien plus longtemps encore, rassemble passionnément tout ce qui concerne le passé d'Houffalize et nous le livre régulièrement au travers de livres et d'articles de revues.
Par la qualité de ses sources, par le contact direct qu'il a eu avec les archives écrites tout comme avec les derniers témoins, l'auteur nous introduit au coeur du sujet et nous suggère de nombreuses réflexions. Chaque document est riche de cent facettes et l'on pourra examiner à loisir l'architecture et la conception des bâtiments (à mettre en rapport avec les dates de construction), le plan des fosses, la forme des outils, les généalogies et les trajectoires sociales, la période de l'Occupation (peu connue) et de façon générale les informations locales glanées sur les aspects économiques de cette industrie artisanale qui ne résistera pas aux forces économiques et financières du XXème siècle.
Une deuxième contribution à l'histoire des tanneries contenue dans ce livre est celle qu'Éric Jehenson consacre à l'évolution et à la disparition de cette industrie dans une région plus vaste (les deux Luxembourg, Stavelot et Malmédy).
Le but était de contextualiser l'étude plus restreinte de Alfred Dubru. L'auteur a rassemblé l'essentiel de la bibliographie sur le sujet et s'est efforcé, au travers de sources d'un usage délicat, de mesurer l'importance économique de cette industrie artisanale aux XIX et XXème siècles. Il analyse ensuite l'influence de la conjoncture générale, politique, économique, douanière sur le secteur particulier de la tannerie. La question qui se pose est celle-ci : pourquoi et comment ces entreprises, pratiquement toutes, des petites tanneries artisanales et familiales à d'authentiques Sociétés Anonymes employant plus de 1.000 personnes, ont fini par disparaître complètement de notre horizon. Cette contribution d'une cinquantaine de pages nous donne aussi l'occasion de redécouvrir avec le triomphe du Libéralisme à la fin du XIXème siècle, une période de l'histoire ressemblant étrangement à la nôtre avec ses logiques et ses contradictions.
